Les chiffons font font

« Choses de prix est le résultat du travail d’un collectif associant des « praticiens de l’art » (artistes, curateurs, critiques, collectionneurs, etc.) et des « praticiens des sciences humaines et sociales » (sociologues, anthropologues, économistes, philosophes, historiens de l’art et de la littérature), qui se sont réunis pendant deux ans autour de cette question du prix des choses, ou plus exactement, de ce que le prix fait aux choses. Nous nous sommes demandé ce que signifiait, pour une chose, d’avoir un prix, et de passer, par exemple, du cadeau à la marchandise, de l’objet de collection à la relique, de l’échantillon gratuit au déchet. Il nous a semblé que les « choses d’art » étaient un laboratoire privilégié pour observer ces mécanismes, ne serait-ce que parce que les principes de formation des prix y sont particulièrement obscurs. Cependant, Choses de prix n’est pas en soi un objet d’art : c’est une machine à penser qui comprend des objets d’art comme pièces essentielles de son fonctionnement. De même Choses de prix n’est pas un recueil de textes, mais un dispositif qui agence des textes avec des objets très hétérogènes sur le même plan, de telle sorte que les uns comme les autres fassent également penser. Les textes ne parlent pas des choses, les choses n’illustrent ni ne réfèrent aux textes ; côte à côte, selon toutes sortes de liaisons libres, ils mettent en branle la pensée. »

« Choses de prix se présente comme une boîte, ou plutôt une série de 220 boîtes, numérotées de 1 à 200 (+ 20 boîtes « Hors de Prix » et 6 boîtes « faux », « copies » et « contrefaçons »). Les boîtes, de dimensions intérieures 21x30x10cm, seront diffusées dans des librairies, des galeries, des centres d’expositions […]  Au dos de la boîte figure un mode d’emploi, ainsi que la liste de tous les contributeurs associés au projet. Cependant, ces contributions pouvant comprendre des pièces uniques, des séries limitées inférieures à 220 ou des multiples non limités, l’acquéreur ne connaît pas le contenu exact de la boîte qu’il a devant lui. A lui de décider, dans ces conditions, la boîte qu’il souhaite acquérir et donc le prix qu’il est prêt à payer. Il ne prendra connaissance de son contenu qu’une fois la boîte payée et descellée (toute boîte ouverte ne pouvant être revendue, non plus que son contenu). Cette acquisition lui donnera accès à un numéro lui permettant de rejoindre un site Internet où il retrouvera la communauté des acquéreurs qui peuvent troquer leurs objets respectifs. »

Rédaction des auteurs du projet : Nathalie Cau, Sophie Cras, Laetitia Delafontaine, Grégory Delaplace, Arnaud Esquerre, Juan Luis Gastaldi, Patrice Maniglier, Michel Martin, Agathe Nieto, Grégory Niel, Luc Saucier, Michaël Sellam, Bérénice Serra, Eric Watier.

« Choses de prix » a été présenté au Clark Art Institute en Novembre 2017 (Collective Art and Theory Project, International Clark/Terra Workshop on “Value” organized by Sophie Cras) et à la NYU Paris en juin 2017 (“Choses de prix.  An Experiment in Material Speculation,” International Conference on the “Economies of Existence”).